Atelier d'Icônes Anastasis

Création d'icônes de tradition byzantine & cours d'iconographie à Paris

samedi 14 janvier 2017

Le dessin byzantin



Le dessin byzantin, une manière d’être 
La profondeur de l’icône est devant, devant l’image, dans le corps de la personne qui la contemple. La volonté des « peintres de vie », zographes byzantins, chrétiens des premiers siècles, touchés par la nécessité d’exprimer leur expérience par l’image, a été de créer une façon spéciale de représenter l’espace, un espace qui embrasse le spectateur. Ce n’est pas son point de vue qui est au centre et projeté vers l’extérieur, mais par un renversement de perspective, c’est le saint ou la fête qui s’avance vers lui et l’englobe. C’est une expérience à tenter : se tenir devant l’icône en silence et attendre qu’elle s’adresse à vous.
Une relation peut s’établir qui n’est pas seulement d’ordre esthétique. Le langage plastique de l’icône est très sobre, très contenu et en même temps très direct. Les grandes lignes de force ont un rôle fondamental, elles nous atteignent avant les détails, avant même que nous reconnaissions le contenu de la scène. Cela est lié à la composition de l’icône, à la géométrie de base, la charpente de l’image.
Pour entrer dans le mystère, tenter de comprendre, nous copions avec une patience infinie ces lignes chargées de sens. Dessiner d’après un modèle demande une mobilisation de toutes nos capacités, quel que soit notre niveau. Il nous faut observer, apprécier, comparer, chercher le geste, corriger et recommencer. Nos sens de la mesure, de la proportion, de l’équilibre sont sollicités. La lecture d’une courbe demande une sensibilité fine, et pour la retracer il nous faut confiance et volonté et une inlassable humilité. Percevoir les relations entre les lignes, l’harmonie générale, le mouvement de vie qui habite l’image nous oblige à prendre du recul, à ouvrir notre regard. Cet effort de conformité  nous informe et nous transforme non seulement psychiquement mais dans notre être. Ces formes tracées sur la planche entrent en résonnance avec ce qui leur correspond dans nôtre âme.
 Calligraphier ces lignes, c’est comme  jouer une note juste avec un violon, il nous faut aller chercher cela en nous-mêmes par un acte volontaire. Et cet effort éveille en nous des forces qui  étaient en jachère, en même temps nous entrons en contact avec l’intention des maîtres byzantins, avec la qualité spirituelle dans laquelle ils ont créé ces formes. La qualité spirituelle d’un dessin nous permet de nous relier concrètement avec quelque chose qui nous dépasse, à ce moment là nous pouvons avoir l’impression d’appartenir à un mouvement de vie, d’y participer il y a comme un changement de perspective, ce n’est plus « moi » qui est au centre avec mes préoccupations et mes émotions.
Lorsque nous dessinons un corps  nous ne reproduisons pas la morphologie visible d’un homme ordinaire, nous étudions la vie intérieure d’un saint.
Dans l’icône la ligne doit être comme la Parole concise précise et féconde, elle manifeste le mouvement de l’intelligence divine. Toute l’image repose, jusqu’à son aboutissement, sur cette structure sobre et dynamique qui contient l’énergie de la couleur et porte le rayonnement de la lumière. Chaque trait a sa raison d’être et est relié aux autres, non seulement pour décrire les formes mais également pour suggérer un état.
Quand nous dessinons au pinceau sur la planche toutes nos forces participent. Il nous faut faire attention à  trois choses :
-le rôle de telle ligne dans l’ensemble de la composition, sa trajectoire de son point de départ jusqu’à sa fin.
-sa forme propre avec ses nuances, ses pleins et déliés, sa force ou sa finesse qu’il faut  éprouver intérieurement, aller chercher dans les profondeurs de l’être.
- le meilleur geste pour la tracer : orientation de la planche, position de la main, du bras et même de la colonne jusqu’à l’assise.



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